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Mémoire de FAJEF sur l’accès à la justice en français

15 novembre 2018
FÉDÉRATION DES ASSOCIATIONS DE JURISTES D’EXPRESSION FRANÇAISE
DE COMMON LAW INC.
 
 
L’accès à la justice en français dans le cadre de la modernisation de la Loi sur les langues officielles du Canada
 
 
 
Mémoire déposé le 15 novembre 2018 auprès du Comité sénatorial sur les langues officielles
 
 
 
 
                                              Avant-Propos
 
La Fédération des associations de juristes d’expression française (FAJEF), qui regroupe sept associations de juristes d’expression française (AJEF), a pour mandat de promouvoir l’accès à la justice en français dans les provinces et les territoires à majorité anglophone au Canada. Il y a des associations de juristes d’expression française dans les quatre provinces de l’Ouest, en Ontario, au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse. Les sept associations de juristes d’expression française représentent ensemble environ 1 700 juristes et le nombre de juristes d’expression française augmente à chaque année.  
 
La FAJEF travaille de près avec le réseau des AJEF, les organismes nationaux juridiques comme l’Association du Barreau canadien (ABC) et aussi avec la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA). D’ailleurs, la FAJEF est membre de la FCFA.  En outre, la FAJEF travaille activement depuis environ trois ans au sein du Réseau national de formation en justice (RNFJ). Le RNFJ regroupe diverses institutions de formation de l’extérieur du Québec comme les centres de jurilinguistique de Moncton et d’Ottawa, le Centre canadien de français juridique inc., plusieurs collèges et universités francophones du Canada, ainsi que quelques universités anglophones du Canada
 
 
 
                       Table des matières
 
L’accès à la justice en français dans le cadre de la modernisation de la Loi sur les langues officielles du Canada
 
 
I. INTRODUCTION   ………………………………………………………………………………   p. 1
 
II. UN SECTEUR COMPLEXE ET DÉCENTRALISÉ  ………………………………………  p. 1
 
III. RECOMMANDATIONS RELIÉES AU SECTEUR DE LA JUSTICE  ………………  p. 2
 
IV. CONCLUSION ……………………………………………………………………………………… p. 4
 
 
I. INTRODUCTION
 
De prime à bord, la Fédération des associations de juristes d’expression française de common law inc. (FAJEF) partage largement les mêmes préoccupations générales que la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA) avec la Loi sur les langues officielles du Canada (LLO), particulièrement les lacunes en lien avec sa mise en œuvre. Pour cette raison, la FAJEF appuie les recommandations de la FCFA qui font partie du mémoire déposé en mars 2018, notamment les trois recommandations suivantes :
a) Avoir une agence centrale responsable pour coordonner l’appareil fédéral en matière de langues officielles, notamment le Conseil du Trésor;
b) Moderniser les mécanismes de surveillance et d’imputabilité de la LLO;
c) Habiliter les communautés de langue officielle en situation minoritaire à participer à la mise en œuvre de la LLO.
 
II. UN SECTEUR COMPLEXE ET DÉCENTRALISÉ
 
Le secteur de la justice au Canada a, au moins, deux grandes caractéristiques qui influencent toute analyse et toute recommandation pour accroître l’accès à la justice en français au Canada. Les voici :
- Le secteur de la justice est constitué de multiples acteurs qui agissent souvent indépendamment l’un de l’autres, dont les sociétés provinciales et territoriales du Barreau, les divers tribunaux, les facultés de droit, les magistratures provinciales, territoriales et fédérales, les ministères provinciaux, territoriaux et fédéraux de la justice, les barreaux privés, les corps policiers, les services correctionnels, etc.
 
- Le secteur de la justice au Canada est non seulement complexe mais il est aussi fortement influencé par le fédéralisme et le partage des compétences entre le fédéral et les provinces, par exemple, le Code criminel et la Loi sur le divorce sont des lois fédérales, tandis que l’administration de la justice est de compétence provinciale; il y a aussi des juges qui sont nommés par le fédéral et d’autres par les provinces et territoires; il y a des tribunaux fédéraux, territoriaux et provinciaux, ainsi que des ministères provinciaux, territoriaux et fédéraux de la justice, etc.
 
Puisque le secteur de la justice au Canada est très décentralisé et largement de compétences partagées, toute réforme pour accroître l’accès à la justice en français nécessite forcément la concertation de multiples intervenants ainsi que de nombreux gouvernements. Dans un tel contexte, un rôle de leadership fédéral est absolument essentiel pour assurer un plus grand accès à la justice en français au Canada.  Pour cette raison, toute LLO ou tout règlement adopté en vertu de cette loi devrait explicitement identifier les objectifs fédéraux en matière d’administration de la justice en français. 
 
III. RECOMMANDATIONS PRINCIPALES RELIÉES AU SECTEUR DE LA JUSTICE
 
Sans constituer une liste exhaustive, voici nos principales recommandations pour améliorer l’accès à la justice en français au Canada. Pour faciliter la lecture et compréhension, nous avons regroupé nos recommandations en deux catégories. Une catégorie de recommandations vise la Loi sur les langues officielles tandis que l’autre catégorie de recommandations vise d’autres lois fédérales.
Recommandations principales ayant trait à la Loi sur les langues officielles
a) Objectifs fédéraux an matière d’accès à la justice en français au Canada - Les objectifs fédéraux pour assurer un accès égal à la justice en français devraient être explicites dans la LLO ou tout règlement adopté en vertu de cette loi et inclure les objectifs suivants :
 
- Favoriser et assurer pleinement l’accès à la justice en français au niveau fédéral.
 
- Promouvoir activement l’utilisation et le statut du français dans le secteur de la justice au Canada.
 
- Favoriser et assurer pleinement l’accès à la justice en français dans tous les domaines de compétence fédérale, y compris ceux qui sont administrés par les tribunaux provinciaux et territoriaux comme le divorce, la faillite, le Code criminel, etc. 
 
- Promouvoir et appuyer l’accès à la justice en français dans tous les systèmes juridiques et de l’administration de la justice des provinces et territoires, notamment en assurant la traduction des décisions des tribunaux d’appel des provinces et territoires, en assurant les travaux de normalisation, l’élaboration d’outils juridiques et de jurilinguistique en français, en contribuant à l’offre de la formation linguistique, notamment aux juges de nomination provinciale et territoriale, etc. 
 
b) Renforcement de la partie VII pour promouvoir davantage l’accès à la justice en français – Les obligations à la partie VII de la LLO devraient être précisées davantage afin de mieux assurer la promotion de l’accès à la justice en français au Canada. 
 
c) Tous les jugements en version française et anglaise d’égale valeur des tribunaux fédéraux - La publication des jugements des tribunaux fédéraux devrait se faire dans les deux langues officielles et ce, dans les meilleurs délais. Toutefois, il devrait avoir un délai maximal acceptable – par exemple, six mois. Les versions française et anglaise des jugements devraient aussi avoir égale valeur.
 
d) Droit d’être compris dans la langue officielle de son choix sans l’aide de l’interprétation à la Cour suprême du Canada - Toute nouvelle LLO devrait abroger l’exclusion de la Cour suprême du Canada de l’application de l’article 16 de la LLO afin que le droit d’être compris dans la langue officielle de son choix sans l’aide de l’interprétation à la Cour suprême du Canada soit reconnu.
 
e) Formation linguistique à la magistrature fédérale - Toute nouvelle LLO devrait garantir l’offre de la formation linguistique aux juges des tribunaux fédéraux, ainsi qu’à tout autre juge de nomination fédérale. 
 
f) Évaluation obligatoire de la capacité linguistique des candidats et candidates à la magistrature fédérale - Le processus fédéral de nomination des juges devrait assurer un accès égal à la justice en français en exigeant une évaluation des aptitudes linguistiques des candidats et candidates à la magistrature fédérale. 
 
g) Évaluation de la capacité linguistique et désignation des postes bilingues à la magistrature fédérale pour assurer un accès égal à la justice en français auprès des divers tribunaux fédéraux, provinciaux et territoriaux. - Le processus fédéral de nomination des juges devrait assurer un accès égal à la justice en français en évaluant périodiquement et, ensuite, désignant des postes bilingues à la magistrature fédérale pour assurer un accès égal en français auprès des divers tribunaux fédéraux, provinciaux et territoriaux. 
 
h) Programme de contestation judiciaire en droits linguistiques - Toute nouvelle LLO devrait garantir l’existence d’un programme de financement de contestation judiciaire en matière de droits linguistiques.
 
i) Une constitution bilingue – Toute nouvelle LLO devrait prévoir que les divers textes constitutionnels du Canada doivent être obligatoirement adoptés en français comme ils le sont présentement en anglais et ce, afin de mettre en œuvre l’article 55 de la Loi constitutionnelle de 1982.
 
Recommandations principales ayant trait à d’autres lois fédérales
 
a) Loi sur le divorce et Loi sur la faillite et l’insolvabilité -  Les justiciables canadiens et canadiennes devraient tous pouvoir obtenir leur divorce ou faire faillite dans la langue officielle de leur choix et d’avoir le droit d’utiliser le français à toutes les étapes de l’instance qu’elles se déroulent ou non devant le tribunal. Cela serait particulièrement le cas en matière de divorce étant donné ses conséquences sur les familles et enfants. De plus, le droit d’utiliser le français devrait aussi exister en appel.  
 
b) Code criminel – Les justiciables canadiens et canadiennes devraient tous aussi avoir le droit d’utiliser le français à toutes les étapes de l’instance qui se déroulent ou non devant le tribunal, en première instance comme en appel.
 
c) Loi sur la Cour suprême du Canada – Les juges à la Cour suprême du Canada devraient tous être bilingues et donc pouvoir comprendre le français sans l’aide de l’interprétation.
 
IV.    CONCLUSION
L’accès à la justice en français est un enjeu important pour les Canadiens et Canadiennes.  À l’heure actuelle, nous croyons que l’approche fédérale en matière d’accès à la justice en français a trop souvent été fragmentaire et incomplète. Bien que certaines initiatives fédérales aient pu certainement contribuer à favoriser l’accès à la justice en français au Canada, la FAJEF croit que les recommandations susmentionnées permettraient d’avoir une approche plus systémique et mieux adaptée, à la fois, à la complexité et nature décentralisée du secteur de la justice pour accroître l’accès à la justice en français au Canada.  
 
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